Pas un hectare de plus !

Pas un hectare de plus !

Communiqué du collectif « Les Semeuses », mai 2024

Les constructeurs en herbe de la plus grande poubelle nucléaire jamais imaginée et que la France veut implanter en Meuse et en Haute-Marne augmentent la pression et veulent exproprier 550 parcelles ! Parmi celles-ci se trouve une partie importante des 3,4 hectares actuellement cultivés par notre collectif de maraîchage – un bon tiers de nos surfaces.
En tout, plus de 300 propriétaires ont recu des notifications annoncant ce nouveau forcing de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). Face à cette menace existentielle de notre activité de maraîchage écologique, nous tenons à prendre position, pour contribuer au débat public depuis la base, parmi toutes les personnes opposées à la dévastation de la région.

Depuis plus de 25 ans, l’ANDRA et ses négociateurs de foncier, ont arrosé communes et habitant.e.s du secteur, sans arriver à étouffer l’expression des réticences au projet de décharge nucléaire CIGEO. Des procédures de remembrement, des échanges « amiables » de parcelles, des pressions diverses, l’organisation de la discorde entre les habitant.e.s et l’acquisition de centaines d’hectares témoignent de la volonté des porteurs du projet CIGEO, d’avancer dans leurs travaux, bien avant qu’une autorisation de création (DAC) soit actée.
Jusqu’à la mi-avril 2024, la phase d’enquête parcellaire était censée démontrer la bonne foi des nucléocrates pour légaliser l’accaparement massif industriel des terres et des forêts du coin. Comme d’autres procédures similaires, il s’agissait de passer une pommade démocratique sur des enjeux existentiels pour les populations rurales. Ainsi le résultat fixé à l’avance a été, comme lors de la dite « déclaration d’utilité publique » (DUP), une nouvelle déclaration des commissaires enquêteurs « indépendants » de l’ordre « tout le monde est d’accord, avancez donc, la critique n’existe pas ».

Mais l’opposition s’organise, et certaines communes, comme celle de Mandres-en-Barrois, ont renouvelé leur critique du cheval de Troie « Laboratoire », en refusant unanimement de céder leurs terrains en surface comme en « tréfonds ». De nombreuses exploitations, associations riveraines et collectifs ont annoncé ne pas vouloir céder aux pressions et se défendre contre l’avancée en force de l’ANDRA. Nous continuerons de nous organiser contre la poubelle nucléaire et pour la défense du vivant, aux côtés de celles et ceux qui pensent que le sud meusien et le nord de la Haute-Marne méritent mieux que ça !

Avec cette enquête préalable à la déclaration de cessibilité des parcelles nécessaires pour réaliser la première tranche du centre de stockage CIGEO, l’ANDRA annonce la couleur : en cas de collaboration, une compensation est envisageable. Celles et ceux qui ne se laissent pas acheter maintenant seront tout simplement expropri.é.es puis expulsé.es de leurs terres. Toutes les questions techniques, sur la possibilité de financer ce projet monstrueux, sur les dégâts environnementaux, notamment sur l’eau si précieuse, et celles sur la sécurité d’une telle infrastructure, sont balayées depuis des années.

Nous n’avons aucune confiance dans une institution dont le coeur d’activité reste la communication pour apaiser le peuple et inventer un discours de « nucléaire écologique ». Prennons juste quelques exemples que les intéressés du nucléaire dénient pour continuer d’enfumer la population: des exploitations d’uranium et décharges toxiques actuellement innondées en Russie et en Allemagne, des centrales délabrées comme Cattenom ou Tricastin, des projections inconstructibles comme l’EPR de Flamanville, des mines abandonnées des Vosges à la Côte d’Azur, des exploitations aux mains d’intégristes dans d’anciennes colonies, des essais nucléaires du Sahara à la Polynésie, des plages et vignobles irradiées à Narbonne où à Marcoule, aux terres incultivables à Fukushima, en Ukraine et en Normandie. C’est en faisant abstraction des faces cachées du nucléaire que l’État continue de nous vendre un produit cher et dangereux. Ces formats « participatifs » ne changeront jamais sa détermination de s’accaparer ce qu’il voudra dans l’« intérêt public ».

Cette fausse transparence et la capitalisation généralisée du vivant au profit d’une industrie mortelle doit cesser et un revirement complet de la politique rurale, agricole et énergétique est existentielle pour les générations futures et les paysans et paysannes, ici et ailleurs. Déjà sans l’ANDRA, la possibilité de s’installer et de bâtir des exploitations aux cycles économiques et écologiques vertueux est difficile. L’inaccessibilité des moyens de production et le déni démocratique dans tous les domaines techniques profite toujours aux mêmes. Ce qui se passe dans les chambres d’agriculture, dans certains bureaux de la SAFER et dans les valises des nucléocrates est digne d’un polar sur la Cosa Nostra, plus que d’une procédure démocratique. Nous devons créer des perspectives durables et investir (dans) les campagnes – autrement. On est convaincue.s qu’il faut oeuvrer pour rendre les terres accessibles aux paysans et paysannes au lieu de faire le forcing pour l’agrandissement des fermes et l’industrialisation de toute production. Il s’agit d’investir dans la recherche et la formation, au lieu de s’entêter à donner suite à des modèles à bout de souffle, tant dans le domaine de la gestion de l’énergie et de ces déchets, que dans celui des métiers du vivant.

Nous nous trouvons dans la cinquième saison d’une aventure paysanne et antinucléaire, regoupant des gens d’ici et d’ailleurs, et ayant pour but de contribuer à une autonomisation alimentaire et materielle dans ces contrées. Nous bâtissons des rapports solidaires avec d’autres fermes et lieux collectifs en lutte, comme notamment la gare de Luméville à quelques kilomètres de nos champs, également menacée d’expropriation. Notre projet, de fait en opposition à la dévastation qui serait engendrée par le projet de poubelle nucléaire, s’inscrit dans une démarche coopérative et solidaire, pour contribuer à une dynamisation et une vie désirable ici et maintenant. Elle contribue à bâtir de l’espoir dans une région délaissée, sinon instrumentalisée et dévastée, par les pouvoirs centraux européens, depuis plus de deux siècles.

La réalisation de CIGEO serait synonyme de l’effacement de toute une contrée pleine de potentiel autre que celui de devenir la décharge toxique numéro 1 en Europe. En vue de la possible perte des champs que nous cultivons, nous appellons à continuer et à renforcer la mobilisation contre la société industrielle, la relance du nucléaire et le projet CIGEO. Nous défendrons le vivant en face de leurs désirs de bétonisation et de destruction massive – avec vous. Pour de vraies coopératives et une ruralité solidaire, écologique et autonomiste.

 

Bâtissons la commune du Barrois !
Stoppons CIGEO, labourrons l’ANDRA ! Pas un hectare de plus !

Communiqué du collectif « Les Semeuses », mai 2024

 

01/06/2024

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