Maxime Amblard a visiblement été séduit par sa descente dans les entrailles du « labo » de Bure. Selon l’Est républicain (01/09/2024) [1], il n’aurait pas appris grand chose (ingénieur en énergie nucléaire, il avait « potassé le sujet ») mais il est impressionné. Le directeur des activités Andra Grand Est, Patrice Torrès, a bien fait le job. Bilan, tout est « poussé côté études et démontrable côté résultats ». De quoi satisfaire un élu qui a entendu ce qu’il avait envie d’entendre, pas besoin d’aller plus loin dans l’investigation.
Une trompeuse aura de « spécialiste »
Les particules radioactives seraient confinées dans une argile aux propriétés miraculeuses et cela résumerait le projet Cigéo. Le nouvel élu fait dans la simplification extrême et cela ne rassure pas.
Car enfouir les déchets radioactifs les plus dangereux comporte un grand nombre d’inconnues structurelles qui mettent à mal ce concept de confinement « magique ». Le nouvel avis de l’Autorité environnementale (Ae) [2] sur le projet Cigéo pointe encore et toujours une liste de lacunes et d’études à poursuivre : incertitudes sur les propriétés des couches géologiques, sur les failles géologiques, la méthode de creusement, les modèles hydrogéologiques, les scellements et la capacité à fermer l’installation, la corrosion des alvéoles, etc. Au rang des préoccupation majeures, risques d’explosion (Hydrogène) et d’incendie en grande profondeur, ou encore impacts des événements climatiques extrêmes, sur les installations de surface et sur la sureté des installations souterraines, sont toujours d’actualité.
Pas de quoi empêcher de dormir un adorateur du nucléaire qui ne s’en cache pas. Pour lui les déchets sont presque « neutralisés », ce n’est donc plus un problème. Il faut massivement électrifier notre consommation énergétique, via la construction de nouveaux réacteurs (dans la surenchère, quand le président Macron en envisage 14, le RN en projette 20, lui en préconise 34 d’ici 2050).
Fidélité à la ligne de son parti, le Rassemblement National, il annonce un moratoire sur l’éolien. En matière de vision étroite et passéiste, on ne fait pas mieux.
… et un élu parachuté, qui a bien appris la leçon
Outre une profonde méconnaissance du dossier technique – feinte ou réelle ? -, Maxime Amblard ne semble pas plus informé sur l’aspect démocratique. Selon lui Cigéo fait l’objet d’un « large consensus, politique et international ».
Là encore, amalgame de clichés approximatifs. En ré-écrivant l’Histoire, qui reposerait sur des lois parfaites, des décrets et de débats vertueux, il fait l’impasse totale sur les multiples oppositions citoyennes ou scientifiques que soulèvent ce projet depuis les années 1980.
Et le Clis de Bure serait l’organe de validation locale. Grossière erreur, le Comité local de suivi et d’information est financé exclusivement par les producteurs de déchets, la majeure partie de ses membres étant des élu.e.s gérant leur collectivité avec les fonds du GIP [3]. On ne voit pas comment il reflèterait une quelconque validation, l’opposition locale y étant active mais largement sous-représentée.
… et qui voudrait encore vendre du rêve
A l’instar des précédents sénateurs et députés, il fait miroiter « une opportunité incroyable » en matière d’emplois et de développement… qu’attendent toujours les élu.e.s depuis 2000. Une belle supercherie vu que le chantier, si autorisé, comporte des risques sanitaires sans précédents, et que le territoire, à moyen terme, devrait être vidé de sa population pour faire place à la mégapoubelle radioactive, comme le suggérait l’Autorité environnementale dans son avis de janvier 2021 [4].
Seule exactitude en demi-teinte, qualifier les anti-nucléaires de « Cassandre ayant tout faux »
Oui, l’opposition à Cigéo prédit sans relâche les dangers de l’enfouissement des déchets nucléaires et ses arguments n’ont jamais été démentis. Mais, différence de taille, elle semble avoir sans conteste une bien meilleure connaissance du dossier qu’un député venu en visite… commerciale ?