Les déchets dits « bitumés » ont été produits à partir du milieu des années 60 dans les usines de Marcoule (30) et de La Hague (50). Des « boues » radioactives, obtenues par filtration et concentration d’éléments rejetés par les centrales nucléaires, ont été mises dans des fûts et enrobées de bitume. Une méthode de confinement plus simple et surtout beaucoup moins chère que la cimentation ou la vitrification. Mais aussi beaucoup plus risquée. Car elle confère à ces déchets (75 000 colis en 2009, 9 700 tonnes de bitume pur (cf 1.)) des caractéristiques qui les rendent particulièrement dangereux :
Des enveloppes de déchets qui peuvent s’enflammer… qui produisent des gaz explosifs… qui peuvent être
sujettes aux déformations, fuites et éclatements dans le temps : les dangers inhérents aux déchets bitumés
paraissent évidents.
Si un seul de ces 75 000 colis prend feu, en 20 minutes et avec seulement 20 % des suies générées, les filtres des ventilations de leur stockage seront bouchés (cf 4.) . Sans ventilation, l’hydrogène provoquera incendies et explosions.
Et avec l’opacité due aux suies et fumées, toute intervention sera extrêmement difficile. Sans oublier le risque de propagation du feu aux colis adjacents. En 2017 et en 2018, les autorités ont demandé à l’Andra (cf 5.) soit de neutraliser la dangerosité des colis de déchets bitumés, soit de revoir la conception de Cigéo (cf 6.).
À quelques mois du dépôt de la demande d’autorisation de création de Cigéo, où en est-on ? Un groupe de travail, mandaté par l’ASN, a passé en revue cette question (cf 7.) .
Sans une connaissance précise de chaque fût (son contenu, la répartition des matières et son âge), sans des contrôles et des examens exhaustifs, il est impossible de connaître, et donc de maîtriser les risques qu’ils représentent. Or, on ne sait pas vraiment ce qu’il y a dans ces fûts très différents les uns des autres et sujets à des phénomènes physico-chimiques difficiles à étudier.
Par ailleurs, la possibilité d’un incendie qui se déclencherait et se propagerait d’un colis à l’autre est confirmée. Et les moyens d’extinction prévus par l’Andra ne suffiront pas.
La conclusion rendue en 2019 est claire : rendre ces déchets moins dangereux avant de les enfouir est impossible et surtout trop cher en l’état actuel des connaissances.
Revoir la conception des alvéoles de stockage de Cigéo. L’Andra a initié des études en ce sens, mais interrogée sur la question fin 2019, l’agence n’a rien livré sur leur état d’avancement. La revue mandatée par l’ASN recommande de rajouter quelques centimètres d’épaisseur sur les conteneurs en béton. Et aussi d’attendre un peu avant de mettre des colis bitumés dans Cigéo. D’autant qu’à ce jour, aucun emballage de transport n’existe pour ces colis de déchets bitumés étant donné, justement, les difficultés de conception inhérentes à leur nature si particulière (cf 8.).
Laure Barthélemy et Bertrand Thuillier
Notes:
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13/05/2020
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