Suite à l’annonce d’un accord préliminaire annoncé fin décembre 2024, Orano obtient une concession pour 20 ans (qui pourra être étendue de dix ans) pour produire environ 2500 tonnes d’uranium par an. Orano prévoit d’investir 500 millions de dollars (l’équivalent en euros) d’ici le démarrage de la mine, attendu entre 2028 et 2029. Les coûts totaux d’exploitation sont estimés à 1,6 milliards de dollars, qui seront intégralement assumés par Orano.
Ce projet, développé par Badrakh Energy — une coentreprise entre Orano et MonAtom —, reflète la stratégie de la Mongolie pour diversifier son économie, historiquement centrée sur l’agriculture et les ressources fossiles comme le charbon. L’exploitation de cette mine contribuera également à répondre à la demande mondiale croissante en énergie nucléaire.
Cet accord intervient dans un contexte délicat. Orano doit composer avec des enjeux juridiques, ayant accepté une amende de 4,8 millions d’euros pour des accusations de corruption passées en Mongolie, tout en renforçant ses normes de conformité. La Mongolie, quant à elle, jongle entre ses puissants voisins, la Chine et la Russie, tout en cherchant à renforcer ses liens avec des partenaires occidentaux, tels que la France.
Il y a découvert le gisement de Dulaan Uul en 2002, avant d’identifier non loin celui de Zuuvch-Ovoo, un filon majeur, en 2010. Les deux gisements seront exploités, pour des ressources totales estimées à près de 90000 tonnes. Si tout se passe bien, la construction débutera d’ici quelques mois, après la confirmation de diverses étapes administratives, dont la validation de l’étude de faisabilité.
Pour les acteurs étrangers, il n’est pas simple d’obtenir des permis miniers dans le pays, où la dernière mine d’uranium a fermé en 1998. A Oulan-Bator, les négociations de l’accord avec Orano, après la signature d’un protocole d’accord à Paris en octobre 2023, ont été longues. En novembre, une nouvelle loi sur l’énergie nucléaire votée par le Parlement a stabilisé le cadre juridique sur les investissements étrangers dans le secteur minier – clarifiant notamment les conditions de partage de la valeur créée, alors que la Constitution mongole souligne la souveraineté de l’Etat sur ses ressources naturelles. Début décembre, Areva (l’ancien nom d’Orano) a payé une amende de 4,8 millions d’euros en échange de l’abandon de poursuites pour corruption de fonctionnaires mongoles entre 2013 et 2017.
Dans le détail, la construction et l’opération de la mine sera conduite par Badrakh Energy, une coentreprise entre Orano et l’entreprise mongole MonAtom. La participation de l’Etat mongol, auparavant à 34%, tombe à 10% d’actions préférentielles. Mais le contrat signé impose, conformément à la loi locale, qu’au moins 51% des bénéfices générés par l’extraction d’uranium iront à destination du gouvernement mongol. Un chiffre qui comprend les différents impôts et taxes payés par Orano, les dividendes attribués à l’Etat ainsi que des royalties spécifiques dont le montant peut osciller entre 5 et 19% selon le prix de l’uranium.
Le contrat stipule aussi qu’au moins 90% des travailleurs de la mine seront mongoles. Pour opérer la mine, qui représente 1600 emplois, Orano devra construire 100 km de routes régionales entre le site et les villes les plus proches, presque autant de lignes électriques, et une base vie de 1000 lits.
La Mongolie est un vaste pays enclavé entre la Chine et la Russie. Depuis plusieurs années, Oulan-Bator mise sur le développement de ses ressources minérales tout en cherchant à diminuer sa dépendance aux deux superpuissances voisines, dont il reste toutefois très proche, comme l’a rappelé la visite du président russe Vladimir Poutine dans le pays en septembre.
Alors que l’ONG Greenpeace dénonce régulièrement les liens de la France avec des pays satellites russes en pleine guerre en Ukraine, et que le coup d’État au Niger a entraîné l’arrêt de l’usine de concentré d’uranium de la Somaïr, il devenait urgent de diversifier les sources d’approvisionnement.
Pour Orano, cet accord avec la Mongolie permettra de diversifier ses approvisionnements en uranium naturel et de répondre à la demande croissante de combustible nucléaire dans le monde. Si le groupe ne détaille jamais ses clients, il est probable que pour des raisons logistiques, l’uranium extrait en Mongolie (qui représente de l’ordre d’un quart de la consommation du parc nucléaire français) soit physiquement livré à des opérateurs de centrales proches, comme la Chine, la Corée du Sud ou le Japon.
En 2023, le groupe a extrait un peu plus de 7000 tonnes d’oxyde d’uranium, principalement du Canada (où sa production remonte en puissance) et du Kazakhstan. Depuis un an et demi, il ne peut plus exporter la production de sa filiale nigérienne, la Somaïr, dont il a annoncé avoir perdu «le contrôle opérationnel» au profit de la junte au pouvoir en décembre 2024.
Sources : condensé d’articles de Reporterre (le média de l’écologie) et d’usine nouvelle (site internet pro-business, pro-tech et pro-industrie sur lequel il est possible de glaner des infos sur le monde à combattre)
24/01/2025
Ecrit par la Criirad et publié en novembre 2024 sur leur site. Un an après le coup d’État militaire intervenu à Niamey (juillet 2023) rien ne va plus pour les filiales d’Orano (ex Areva) qui... Lire la suite