À Bure, l’agence des déchets nucléaires se paie des gendarmes

Article publié à l’origine par reporterre et mediapart. 5 juin 2020 / Marie Barbier (Reporterre) et Jade Lindgaard (Mediapart)

 

D’après les informations obtenues par Mediapart et Reporterre, une convention a été signée en 2018 entre la gendarmerie nationale et l’Andra, l’agence chargée de l’enfouissement des déchets nucléaires, dans ce village de la Meuse. Depuis, l’agence a payé des dizaines de millions d’euros pour assurer, via des gendarmes, la surveillance des habitants. Ce partenariat pose des problèmes éthiques et juridiques.

Autour de Bure, dans la Meuse, là où les déchets nucléaires les plus dangereux des centrales françaises doivent être enfouis dans une gigantesque mine 500 mètres sous terre, les villages ne sont plus habités que par une poignée de personnes. Et pourtant, 75 gendarmes y patrouillent jour et nuit, 24 heures sur 24. Depuis près d’un an et demi, selon les informations recueillies par Mediapart et Reporterre, ces militaires sont rémunérés par l’Andra, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, qui a installé un laboratoire sur le futur site d’enfouissement.

En octobre 2018, une convention a été signée entre l’Andra et la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) « afin de garantir sur le long terme la sécurité du personnel et des installations » nous a confirmé l’agence, en réponse à nos questions. D’après les chiffres donnés par l’agence elle-même, une « dizaine de millions d’euros » sont dépensés chaque année par l’Andra, un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), pour rémunérer les militaires engagés et couvrir les charges afférentes, notamment de restauration. À ce jour, ce sont donc au moins vingt millions d’euros qui ont été dépensés — ou sont en passe de l’être — dans ce cadre. Les gendarmes mobiles sont hébergés directement sur le site de l’Andra, dans un cantonnement construit à cet effet. Ils y dorment, y stockent leurs matériels et leurs véhicules et y prennent leurs journées de récupération avant de repartir patrouiller. Ces militaires, souvent très jeunes, y restent entre trois et six semaines avant de partir sur une autre affectation. Ils sont aussitôt remplacés par de nouveaux arrivants. La DGGN a refusé de nous communiquer le contenu exact de la convention, malgré nos multiples demandes.

La décision gouvernementale d’affecter un escadron de gendarmes mobiles sur ce territoire date de l’été 2017. En juin, Le Bindeuil, un hôtel-restaurant connu pour accueillir personnels de l’Andra et gendarmes a subi des dégradations alors que se tenaient des journées antinucléaires. Et en août, une manifestation s’est terminée en affrontements avec les forces de l’ordre. Ces faits sont aujourd’hui visés par une information judiciaire, dans laquelle dix personnes sont mises en examen, et qui donne lieu à une surveillance massive et particulièrement intrusive, comme nous l’avons détaillé dans notre enquête en quatre volets.

Face à « un contexte d’actes malveillants et violents commis à l’encontre des personnels de l’Andra, de ses sous-traitants ainsi que de ses installations » décrit l’agence dans un courriel envoyé à Reporterre et Mediapart, le ministère de l’Intérieur du tout nouveau gouvernement d’Édouard Philippe a donc fait installer un escadron de gendarmes mobiles à l’été 2017. Sa mission : « Rétablir et maintenir la sécurité publique. » Mais « la nécessité de maintenir de façon pérenne cet escadron sur le site et de ne pas sur-solliciter les gendarmes locaux » a conduit à la signature plus d’un an plus tard de la convention financière. Pour l’Andra, il s’agit de « garantir sur le long terme la sécurité du personnel et des installations ».

A 500 mètres sous terre dans le laboratoire du futur site d’enfouissement de déchets nucléaires à Bure.

Est-il légal de payer un escadron de gendarmes pour se protéger ? « Le principe de la facturation des forces de l’ordre est très ancien », explique Mickaël Lavaine, maître de conférences en droit public à l’université de Bretagne Occidentale, qui en a retrouvé la trace dans les mémoires de Talleyrand parues en 1891. Plusieurs textes ont développé cette pratique après la Seconde Guerre mondiale. D’abord pour les compétitions sportives comme le Tour de France, puis plus largement pour tous les « services d’ordre qui ne peuvent être rattachés aux obligations normales incombant à la puissance publique en matière de maintien de l’ordre ».

Longtemps restés en sommeil, ces dispositifs ont été relancés par un décret, signé par Alain Juppé en 1997, qui précise le « remboursement de certaines dépenses supportées par les forces de police et de gendarmerie ». Ces conventions ont été par la suite encadrées par un décret adopté par le premier ministre François Fillon (UMP) le 12 mars 2008 ouvrant la possibilité d’une « rémunération » de services du ministère de l’Intérieur par « des personnes privées ou publiques autres que l’État ». Un arrêté du 28 octobre 2010 a fixé le montant des remboursements de « certaines dépenses supportées par les forces de police et de gendarmerie » et a listé les prestations : mise à disposition d’agents, de véhicules, de matériels ou d’équipements spéciaux (barrières, signalisations), escortes, remorquage de véhicules immobilisés ou accidentés et acheminement, alimentation et hébergement des personnels. Le taux horaire par agent mis à disposition a été fixé à vingt euros (au 1er juillet 2014).

En 2009, une convention a été ainsi signée avec EDF pour la protection des centrales nucléaires. « Au niveau national, l’effectif global est de l’ordre de mille gendarmes », nous confirme EDF, qui précise que « ce peloton spécialisé est financé par EDF » mais que cette dernière « ne communique pas sur le coût de cette protection ».

Il s’agit d’empêcher qu’une nouvelle Zad, comme celle de Notre-Dame-des-Landes, ne se forme

Mais le laboratoire de l’Andra ne peut être, a contrario des centrales nucléaires, considéré comme un site sensible. Aucun déchet radioactif ne s’y trouve pour l’instant. Les travaux de creusement de Cigéo ne doivent pas commencer avant 2025 au plus tôt, et son entrée en exploitation est annoncée à partir de 2035. « Oui, mais c’est le seul site choisi pour stocker les déchets nucléaires, commente un gendarme qui a participé à ces opérations. C’est un projet à très long terme. »

Dès lors, à quoi sert le peloton de gendarmerie payé par l’Andra sur le site de Bure ? Selon de nombreux habitants que nous avons pu contacter, ces gendarmes sont principalement affectés à la surveillance du territoire et de ses habitants. Pour les forces de l’ordre, il s’agit d’éviter que les militants expulsés du bois Lejuc — une forêt communale un temps occupée par des opposants à Cigéo — ne reviennent. Et d’empêcher qu’une nouvelle Zad ne se forme, à l’exemple de celle de Notre-Dame-des-Landes, en Loire-Atlantique.

Une équipe de gendarmes stationnée à l’entrée sud du bois Lejuc.

Quand le confinement pour se protéger du coronavirus a commencé en mars dernier, « je me suis dit qu’on était déjà confiné depuis 2017. C’est pas plus, mais c’est pas moins ». Michel Labat habite à Mandres-en-Barrois, un village de la Meuse, proche de Bure. Il est connu de tous comme opposant à Cigéo. Pendant le confinement, il a été contrôlé alors qu’il allait chercher du pain à quelques dizaines de mètres de chez lui. Il se souvient que le jour où le maire a distribué du gel hydroalcoolique dans les rues du village, une femme est venue se plaindre à haute-voix du grondement des jeeps des gendarmes la nuit dans les rues du village. Pour Jean-Pierre Simon, agriculteur et militant anti-Cigéo : « Pendant le confinement, ça n’a pas faibli du tout. Toutes les deux heures ils passent devant chez moi. Au grè des équipes ou peut-être de leurs chefs, ils sont cools ou pas cools. Plus ou moins hargneux. » Lui habite à Cirfontaines, un autre village tout proche du futur site d’enfouissement. Selon lui, pendant le confinement, sur les routes du coin, « 50% du trafic, c’était eux ».

Jacques Guillemin, opposant et habitant de Mandres-en-Barrois, a passé beaucoup plus de temps chez lui que d’habitude du fait du confinement. Un jour, il dit avoir compté 27 passages d’un véhicule de gendarmes devant sa maison : « Un coup en Kangoo, un coup en jeep, ou en 4×4. J’en ai marre. Ils passent au ralenti. Me surveiller comme ça, ça ne me plaît pas. » Selon ses décomptes, les militaires passent en moyenne cinq fois par jour devant sa demeure. Parfois, c’est dix. « Personne ne vient chez nous sans que leur voiture ne soit prise en photo », ajoute-t-il. Tous les opposants interrogés par Reporterre et Mediapart pour cet article ont livré le même témoignage.

Un soir, Jacques Guilllemin dit avoir installé une caméra sur le rebord d’une fenêtre de son grenier pour filmer les passages incessants des militaires. Le lendemain matin, des gendarmes locaux sont venus lui demander de retirer l’appareil. Sollicités par Reporterre et Mediapart, ni la gendarmerie nationale ni les gendarmes locaux n’ont répondu à nos questions concernant ces patrouilles permanentes. « C’est pas une vie. Je le vis très mal, et ma femme aussi. On ne se sent plus chez nous. »

Jean-François Bodenreider est kinésithérapeuthe à Gondrecourt, et lui aussi, opposant notoire à Cigéo. « Nous avons des rapports très cordiaux avec les gendarmes locaux. Ce ne sont pas eux qui font de la répression contre les opposants. » Les patrouilles de gendarmes ont commencé avant la signature de la convention, dès 2016, selon plusieurs habitants. Mais depuis, elles n’ont jamais faibli. « Au départ, c’était des réservistes, se souvient Michel Labat. Ils étaient beaucoup plus gentils. Ils étaient curieux, ils voulaient discuter. » Depuis, « il y a de plus en plus de patrouilles, selon Jean-François Bodenreider. « Ils tournent à deux ou trois par véhicule. Quelques fois, ils se suivent à dix minutes ou même pas. » Selon lui, « ils relèvent la plaque d’immatriculation de chaque véhicule garé devant chez nous et vérifient s’il est interdit de séjour sur le territoire. On les a déjà surpris à observer une voiture garée devant chez nous à 4 heures du matin. Si ma femme sort la tête et leur dit : « Celle-là vous l’avez déjà !, ils répondent : « On fait notre métier ». »

« C’est un choix politique. Les gendarmes n’ont pas la maîtrise de la chose. C’est le ministère qui décide. »

Les patrouilles de gendarmes sont incessantes à Bure et dans ses alentours. Ici, en mai 2019.

Une quinzaine de kilomètres est quadrillée 24 heures sur 24, comme nous l’a confirmé un militaire qui a participé à ces opérations : « Des gens sont surveillés. Comme la zone est très petite, ça fait forcément beaucoup de passages ». Quatre patrouilles de trois ou quatre gendarmes circulent en même temps. À quoi servent ces rondes incessantes ? « Il faut bien savoir qui est là, et qui est venu. Des habitants s’en offusquent, certains sont excédés. Mais c’est un choix politique. Les gendarmes n’ont pas la maîtrise de la chose. C’est le ministère qui décide. » Le même type de quadrillage et de relève systématique de plaques de véhicules aurait été pratiqué à Notre-Dame-des-Landes avant l’abandon de l’aéroport.

D’après les habitants interrogés pour cet article, les véhicules de patrouille sont des véhicules réformés, de vieilles Range Rover, ou des modèles plus récents de Kangoo et Transit. Un villageois les a vus se déplacer de nuit avec des lampes torches portant le sigle de l’Andra. Quelles sont exactement leurs prérogatives ? La Direction générale de la gendarmerie nationale n’a pas voulu répondre à nos questions.

Dans un rapport sur les événements survenus à Bure et leur traitement judiciaire, la Ligue des droits de l’Homme explique que « l’ensemble des témoins disent avoir constaté que les personnes connues pour ne pas s’opposer au projet d’enfouissement de déchets radioactifs ne font pas l’objet des mêmes contrôles et de la même surveillance des forces de l’ordre ». L’association remarque que « les contrôles d’identité permanents et répétés portent atteinte aux libertés individuelles » et ne peuvent « que déboucher sur des incidents ».

Le « monstre Cigéo » devant les grilles de l’Andra lors des « 200.000 pas », une marche populaire organisée en 2016.

Me Matteo Bonaglia, l’un des avocats des mis en examen dans le cadre de l’information judiciaire pour association de malfaiteurs, se dit « surpris de tels moyens alloués à l’Andra. Cela explique toutefois la surmilitarisation que l’on observe sur ce territoire où se joue la lutte contre le projet d’enfouissement des déchets nucléaires, l’Andra pouvant s’allouer le concours de la force publique dans une proportion trois fois plus importante que partout ailleurs. Il est déjà difficile de s’opposer au projet Cigéo et de faire valoir ses opinions antinucléaires. Ici, la multiplication des contrôles et la surreprésentation des gendarmes constitue de facto une entrave à la liberté d’opinion et à la libre expression des idées. Elle explique également le grand nombre de procès intervenus ces dernières années pour des infractions telles outrage et rébellion, tout le monde n’acceptant pas si facilement d’être l’objet de contrôles incessants. »

Cette convention avec la gendarmerie est d’autant plus problématique que l’Andra apparaît à plusieurs reprises dans le dossier actuellement en cours d’instruction après le début d’incendie à l’hôtel-restaurant du Bindeuil, dans lequel dix militants antinucléaires sont mis en examen et auquel Mediapart et Reporterre a pu avoir accès. L’agence ne s’est pas constituée partie civile, mais a porté plainte à trois reprises. Ainsi, le 17 février 2017, son directeur, David Mazoyer, porte plainte « au nom de l’Andra » après des « dégradations » commises sur le site de l’écothèque, appartenant à l’agence. « Dans la nuit du 16 au 17 février 2017, explique le directeur aux gendarmes de Ligny-en-Barrois, les opposants ont endommagé, plié ou arraché la clôture de l’enceinte de ce site, principalement sur la façade Ouest et sur un linéaire d’environ 150 mètres. » Ces dégradations ont fait l’objet d’un réquisitoire supplétif et ont rejoint la longue liste des délits visés dans cette instruction tentaculaire.

Quelques mois plus tard, le 21 juin 2017, le jour du début d’incendie à l’hôtel-restaurant Le Bindeuil, David Mazoyer a déposé une deuxième plainte : « D’autres membres de leur mouvement s’en sont pris au digicode du portail piéton donnant accès au site de l’Écothèque. Cet appareil est endommagé et hors d’usage. Je dépose plainte au nom de l’Andra pour la destruction de cet appareil. » Enfin, le 24 avril 2018, c’est le chef du service de protection et prévention des risques de l’Andra qui a porté plainte pour recel de documents après la découverte de photos appartenant à l’Écothèque lors d’une perquisition.

D’après nos informations, le peloton de gendarmes payés par l’Andra n’est pas affecté à la « cellule Bure », une cellule de gendarmes avec leur propre écusson chargés de l’enquête en cours. Mais que dire d’un plaignant qui rémunère des gendarmes pour aller surveiller les gens contre qui il a porté plainte ? Sur ordre de la préfecture, les gendarmes de l’Andra peuvent aussi en théorie être affectés au maintien de l’ordre dans des manifestations ou au palais de justice. Le mélange des genres serait alors total : un plaignant qui paye les forces de l’ordre dans une manifestation contre lui ou pire, lors de procès des opposants à son projet…

Outre ce potentiel conflit d’intérêt, la convention entre l’Andra et la gendarmerie nationale, en apparence légale, soulève des questions juridiques. En 2018, une circulaire du ministre de l’Intérieur Gérard Colomb a ouvert la voie à une facturation beaucoup plus large que ce qui avait été initialement prévu. « La circulaire ne prend plus la précaution de la limitation aux ’organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles à but lucratif’. On peut facturer à tout le monde, peu importe l’objet et la finalité lucrative ou non », précise Mickaël Lavaine. En 2018, la publication de son article dans la revue de l’actualité juridique du droit administratif a donné lieu à un recours engagé par le Collectif des Festivals devant le Conseil d’État, les organisateurs dénonçant les sommes considérables de sécurité dont ils devaient s’acquitter auprès de l’État.

Ce mélange des genres interroge sur l’impartialité du travail policier

Dans ce débat de juristes s’opposent les deux alinéas de l’article L211-11 du code de la sécurité intérieure, organisé par la circulaire Colomb. Le premier précise que ces conventions concernent uniquement les « organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles à but lucratif », le deuxième cible beaucoup plus largement toutes « personnes physiques ou morales ». « Le Conseil d’État devra statuer sur ce débat : l’alinéa 2 est-il lié à l’alinéa 1 ? S’il statue en ce sens, ce que je défend, cela veut dire que l’Andra ne peut pas se faire facturer, ni des associations qui organisent le festival de la patate. Cela permettrait de revenir à l’esprit du texte du tour de France », précise Mickaël Lavaine. Le Conseil d’État devrait trancher d’ici l’été.

Au bois Lejuc, près de Bure (Meuse).

Pour le chercheur, ce débat juridique pose une question beaucoup plus large : « Le code de la sécurité intérieure précise que peuvent être facturées ’les forces de police ou de gendarmerie des services d’ordre qui ne peuvent être rattachés aux obligations normales incombant à la puissance publique’. Mais quelle est l’obligation normale de l’État ? Cette notion est suffisamment floue pour pouvoir y mettre ce qu’on veut. Si on pousse la logique de la circulaire Colomb jusqu’à son terme, rien n’interdit de facturer à l’organisateur d’une manifestation FO ou la CGT les dispositifs policiers d’une manifestation. Pourtant, la Déclaration des droits de l’Homme prévoit que la force publique doit être financée par l’impôt. »

Pour Me Alexandre Faro, avocat de l’une des militantes témoin assistée dans l’instruction ouverte après l’incendie du Bindeuil, « cela équivaut à privatiser la police au profit de l’Andra. D’un strict point de vue juridique cela est très contestable car en France la police est un monopole de l’État et la Constitution prévoit que la souveraineté est exercée par le peuple et pour le peuple. »

Ces débats ont aussi animé les salariés de l’Andra lorsque la convention avec la DGGN a été signée. Une source interne nous raconte que « ça a posé des questions » : « Pourquoi c’est l’Andra qui paie alors que c’est un établissement public ? »

Loin d’être anecdotique, la dizaine de millions d’euros par an décaissés par l’Andra pour payer la présence de l’escadron de gendarmes représente une somme significative. En 2018, le résultat net de l’agence ne s’élevait qu’à 11,5 millions d’euros, principalement constitué du crédit impôt recherche, comme l’indique le rapport annuel financier de l’établissement. Les dépenses liées à Cigéo sont directement financées par les trois grands acteurs du nucléaire : EDF et Orano, deux sociétés privées, et le CEA, un établissement public de recherche. En 2018, ils ont versé 212 millions d’euros dans le projet de site d’enfouissement.

Les gendarmes payés par l’Andra qui quadrillent le territoire ne sont pas les mêmes que ceux qui enquêtent pour la justice dans la cadre de l’information judiciaire et ont écouté pendant des mois les opposants à l’Andra. Mais ils appartiennent à la même institution. Ce mélange des genres interroge sur l’impartialité du travail policier. La puissance publique ne se retrouve-t-elle pas en situation d’insincérité face aux citoyens qu’elle contrôle avec un tel acharnement ? Les gendarmes, l’Andra, la justice, les dirigeants politiques d’un côté ; les opposants de l’autre. Deux camps soudés, l’un face à l’autre, comme en situation de guerre.

06/06/2020

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