Texte que l’on a reçu par mail le 20 mars suite au repport de la semaine antinucléaire. Version pdf ici.
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La situation de confinement actuelle possède certaines ressemblances avec les épreuves d’un embastillement dont celles et ceux qui en sont sortis nous rappellent qu’elles ne se traversent pas si aisément et qu’il nous faut y porter quelque attention. Au-delà des exercices physiques, des promenades quotidiennes et de nos indispensables échanges numérisés, la musique, la lecture, la réflexion et l’écriture peuvent devenir des viatiques appropriés, non seulement pour traverser les semaines, voire les mois qui viennent, mais surtout pour qu’une fois cet obstacle franchi, nous puissions solder les comptes avec les pouvoirs en place, sur tous les plans. Car tout un chacun aura remarqué que cette pandémie se double d’une crise financière 1 et qu’elles arrivent au moment où, ici comme ailleurs, des fissures se dessinent dans les systèmes de domination et d’exploitation. Il va sans dire que ces pouvoirs tenteront d’instrumentaliser la situation à leur profit. On le savait avant Machiavel. Pour autant, se retrancher dans une dénégation des dangers provoqués par ces phénomènes pourrait s’avérer périlleux ; mieux vaut y faire face, nous y reviendrons de manière plus précise dans une autre livraison de ces « Carnets de réclusion ».
Avant même qu’elle soit sortie de la pandémie, quelques commentateurs montrent la Chine en exemple pour sa bonne attitude en ce domaine. Outre qu’il s’agit-là d’un jugement hâtif, personne n’est en mesure de certifier les informations et les chiffres en provenance de cet empire de la bureaucratie. D’autant qu’il se produit là-bas des transformations profondes qui n’augurent rien de bon quant au statut de la vérité, voire de la réalité. Quant au statut et à l’existence des êtres vivants dans cet enfer numérique et politique, ils font l’objet de ce premier texte.
« Le sentiment de sécurité est le meilleur cadeau qu’un pays puisse offrir à son peuple », Xi Jinping 2 .
Un phénomène socio-politique impliquant toutes les activités humaines, matérielles et intellectuelles, publiques et privées, est en train de changer la vie d’un milliard quatre-cent millions de Chinois 3 . Et ce n’est qu’une première étape. Sous notre regard distrait s’est mis en place en Chine un redoutable système de « crédit social ». Un évènement majeur sur les plans historique, anthropologique et politique que nous ferions bien d’intégrer à nos réflexions théoriques. Car il ne s’arrêtera pas à nos frontières comme le nuage de Tchernobyl, n’en doutons pas un seul instant.
Le système de crédit social chinois est né au moment où Pékin négociait les termes de son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce. Il s’est inspiré des critères du « scoring bancaire » qui évaluent les capacités de remboursement des emprunteurs – entreprises ou ménages – et en tirent une note en fonction du risque encouru.
Xi Jinping l’a défini à plusieurs reprises : le schéma de programmation émis par le gouvernement et coordonné par le groupe central de premier plan du Parti qui œuvre à la Commission nationale de réforme et de développement [la CNRD, un des principaux organes décisionnels du parti] a prévu de mettre en place le système de crédit social sur tout le territoire en 2021. Son objectif est la sensibilisation de toute la société à l’intégrité et à la crédibilité, afin de parfaire l’économie socialiste de marché. C’est un exemple de notre approche de haut-niveau de toutes les questions 4 .
Traduction en novlangue européenne : le système de crédit social, contrôlé par le Central Leading Group for Comprehensively Deepening Reforms, est un exemple de l’approche chinoise de haut niveau. Au-delà de la distribution de notes, il vise à surveiller, évaluer et réglementer le comportement financier, social, moral et politique des citoyens ainsi que celui des entreprises.
La notation est obligatoire pour toutes les entreprises ou ONG opérant sur le territoire et pour tous les Chinois. Pour ces derniers, cela se traduit par une injonction à se conformer à la définition officielle du citoyen et à participer « au développement du pays sans menacer l’équilibre social ». Le système est censé assurer la stabilité et la sécurité pour tous et permet, au passage, de détecter les activités ou les « individus déviants ».
Aussi, la totalité des lieux publics urbains majeurs doit être équipée de caméras à reconnaissance faciale : c’est le programme « Filet du ciel ». À la campagne, le projet « Yeux perçants » va, dans un premier temps, permettre aux paysans de relier leurs téléviseurs ou leurs smartphones aux caméras de surveillance placées aux entrées des villages. Puis un second plan intitulé « Clarté de neige » équipera de caméras les moindres hameaux pour « une couverture géographique totale, une couverture temporelle totale et un contrôle opérationnel total. 5 »
Quelque six cents millions de caméras couplées à des applications « intelligentes » seront opérationnelles d’ici à la fin de l’année 2020, soit environ une caméra pour deux citoyens, c’est-à-dire trois fois plus qu’aux États-Unis. Le marché international de la reconnaissance faciale a de beaux jours devant lui… La CNRD et la Banque centrale ont conjointement créé un site internet, Credit China, qui rend public tous les mois des listes noires de personnes morales et privées jugées indignes de confiance. C’est ainsi que fin mars 2019, treize millions cinq cent mille personnes avaient été blacklistées.
Malgré la mise en avant du caractère « avant-gardiste » et high-tech du système dont la Chine a fait une de ses priorités, il apparaît que certains de ses aspects restent pour l’instant grossièrement low-tech. Par exemple, la collecte et l’intégration des données, nécessaires à la mise en œuvre d’une évaluation individuelle et globale des citoyens chinois, sont pour l’instant effectuées sans assistance logicielle particulière par des « travailleurs du clic » locaux, les employés des services publics.
En juillet 2019, le projet semblait prendre du retard sur son échéancier initial car des incertitudes demeuraient : avec quel degré de décentralisation allait fonctionner le système ? La notation serait-elle nationalement unifiée ? Etc. Tout en continuant à donner des directives globales, le gouvernement chinois paraissait s’orienter vers une solution qui ménagerait une grande latitude aux collectivités locales. Et ce certainement en vertu de considérations très pragmatiques (coûts, connaissance du terrain). Mais en laissant l’initiative aux collectivités locales, le gouvernement chinois visait sans doute aussi à désamorcer les critiques occidentales selon lesquelles le PCC, incarnant un « Big Brother » oriental, chercherait à imposer un contrôle totalitaire sur la société chinoise. Cette marge de manœuvre laissée aux bureaucraties locales est d’un grand classicisme : cela permet également d’en faire des fusibles de protection des organes de direction en cas de besoin.
En 2019, il fut convenu qu’une partie de la technologie serait fournie par Ant Financial, filiale du plus grand conglomérat de services en ligne Alibaba. L’entreprise gère le programme de fidélisation Sesame Credit dont le directeur général, Hu Tao, a nié, en novembre 2017, que les données étaient partagées avec le gouvernement chinois…
La note, dite de « crédit social » – comparable à l’indice de « désirabilité » attribué par l’application de rencontres Tinder jusqu’en mars 2019 – sera calculée en fonction de toutes les informations disponibles en ligne ou récupérées dans la réalité : identité, empreintes, groupe sanguin, code génétique, dossiers médicaux, assurances, croyances religieuses, diplômes ; les enregistrements des tribunaux, de la police, des banques, des impôts, des employeurs ; l’acquittement de taxes, de tickets de transport ou d’amendes ; les informations collectées sur les sites marchands (Alibaba, Tencent, Baidu), les applications de rencontre dont Baihe ou de téléphonie multifonctionnelle omniprésente comme WeChat ; la géolocalisation, les messages privés, la durée des jeux, les journaux préférés, les coordonnées des proches, le comportement et la notation des visiteurs…
Il existe depuis plusieurs années dans certaines villes chinoises des systèmes de notation des citoyens. Celui de Rongcheng, dans le Shandong, est peut-être le plus abouti. Les habitants sont d’emblée dotés d’un « capital de 1 000 points ». Le système établit six catégories possibles en fonction du score obtenu par chacun 6 :
Sans attendre la finalisation du système, les plus grandes métropoles chinoises s’équipent progressivement de leur propre crédit social. A Shanghai, les habitants peuvent inscrire sur une application dénommée Honest Shanghai leur numéro personnel d’identification administrative pour obtenir une évaluation de leur crédit social fondée sur leur statut professionnel, le paiement de leurs assurances et de leurs impôts, leur casier judiciaire, etc.
Demain, l’évaluation en ligne sera permanente. S’occuper de ses parents âgés, élever ses enfants, rembourser ses crédits, relayer les informations émanant du gouvernement, feront gagner des points. Les décisions de retrait de points seront établies sur la base des informations obtenues par tous les moyens disponibles : vidéosurveillance, actes de justice, réseaux sociaux, déclarations de voisins ou d’entreprises de transport, d’organismes de crédit, des banques, des systèmes de paiements dématérialisés omniprésents en Chine telle Alipay, etc. Critiquer le gouvernement sur Internet, acheter des jeux vidéo ou avoir de « mauvaises fréquentations » sur les réseaux sociaux ou ailleurs feront perdre des points. À Shenzhen, le visage et l’identité des piétons traversant hors des passages protégés sont affichés sur écran géant jusqu’au paiement de l’amende.
Cette gestion dite « intelligente » et par récompenses est historiquement liée au Yield management, une pratique mise en place aux États-Unis dans les années 1980 par les compagnies aériennes. Comme le disait un dirigeant d’Air France à L’ENAC de Toulouse au début des années 2000, elle consiste, pour simplifier, à faire payer le plus cher possible un siège d’avion en fonction de la CSP du client et du motif de son déplacement. Pour cela, il est nécessaire de connaître ou de faire des hypothèses sur l’une et sur l’autre : un voyage en début de semaine avec retour le vendredi, payable avec une carte de crédit d’entreprise ou un compte d’affaires, sera facturé au maximum. Si la personne voyage fréquemment, il lui sera proposé une carte de fidélisation avec des récompenses pour le rendre captif de la compagnie.
Selon l’héritage de cette pratique, les personnes bien notées se verront offrir des « privilèges » : priorité aux admissions scolaires et à l’emploi, par exemple. Facilité d’accès aux prêts et au crédit à la consommation. Location de vélos et de voitures sans dépôt de garantie. Salle de gymnastique gratuite. Transports publics moins chers. Réduction des temps d’attente dans les hôpitaux. Promotion accélérée au travail. Priorité dans la file d’attente pour un logement social. Allégements fiscaux.
Dans la ville de Hangzhou, les « bien notés » ont un accès prioritaire aux offres d’emploi chez Tencent, à des remises sur le prix des smartphones achetés chez Alibaba, à des coupons de réduction sur le site d’e- commerce TMall (possédé par Alibaba) ou encore à des nuits d’hôtel gratuites lors de voyages avec AliTravel.
Les conséquences d’un faible score, ou du fait de côtoyer une personne ayant un faible score, peuvent être diverses, de contrariantes à désastreuses. D’une vitesse d’accès à Internet réduite à un refus de visas, de licences, de permis ou d’accès à certains services sociaux. Une exclusion de la réservation de billets d’avion ou de train à grande vitesse. Une restriction d’accès au crédit, aux services publics ou aux écoles privées. L’inadmissibilité aux emplois gouvernementaux. Un déshonneur public avec exposition en ligne ou sur les écrans géants des espaces publics des noms, photos et numéros d’identification des citoyens inscrits sur la liste noire.
La ville de Pékin prévoit de mettre en place son propre système de notation et de « listes noires ». Ainsi, selon une déclaration officielle de la capitale chinoise, « avant la fin de 2020, sera mis en place un projet de points de confiance personnels, couvrant l’ensemble de la population résidente […] la non-fiabilité dans un domaine entraînera des restrictions dans tous les domaines, de sorte qu’il soit difficile pour les personnes non fiables de n’avancer ne serait-ce que d’une seul pas 8 . »
Les opposants et critiques du régime, les internautes accusés de « répandre des rumeurs », sont voués à être « blacklistés » et à subir des restrictions. Un message d’alerte pourra prévenir ceux qui tentent de joindre par téléphone ces citoyens (ou personnes morales) inscrits sur les listes noires, pour les dissuader d’entrer en relation avec eux. A l’issue de leur peine d’ostracisation virtuelle, les intéressés devront subir une « formation spéciale en vue de la réhabilitation de leur crédit » personnel. Puis, après avoir fourni les éléments demandés dans le cadre d’un rapport attestant de leur bonne volonté et une fois leurs excuses présentées, leur niveau de crédit pourra être restauré.
Société d’apartheid old style ou révolution culturelle maoïste new look ?
Ces systèmes d’évaluation et de notation concerneront les entreprises et leurs dirigeants engagés dans l’import-export, la construction, le transport, les statistiques, le conseil et l’organisation de mariages. Des listes sectorielles complémentaires seraient en cours d’élaboration, 9 officiellement destinées à résoudre des questions telles que la salubrité des aliments, la tricherie et la contrefaçon. Les entreprises ayant un bon score bénéficieront d’avantages tels que de meilleures conditions de crédit et d’investissement ou des taux d’imposition plus bas.
Dans le cas où des entreprises étrangères obtiendraient une note en dessous d’un certain seuil, elles pourraient se voir interdire l’accès à des appels d’offre, subir davantage d’inspections du travail ou du fisc chinois, ou encore pâtir de taux d’intérêt moins favorables. Pire, la punition pourrait concerner les entreprises partenaires ou prestataires travaillant avec la Chine mais basées à l’étranger, à l’image de ce que permet le droit états-unien dans certains domaines.
On peut comprendre maintenant que le système de crédit social, à l’instar de l’implantation de la G5, rejoint la mère des batailles auxquelles se livrent les deux plus grandes puissances capitalistes, car ce qui est en jeu, c’est le contrôle du business et des masses prolétarisées. D’où les cris d’orfraie de Trump qui mobilise la prose orwellienne (il ose !) pour vitupérer Pékin, ce que les médias main stream relayent largement. Liberté, droits de l’homme, respect de la vie privée, concurrence libre et non faussée, tout l’argumentaire démocratique formel, libéral et néolibéral, est convoqué pour disqualifier l’avance prise par le capitalisme chinois.
Dans la culture extrême-orientale, la place du jeu est traditionnellement importante. Les autorités ont donc imaginé un système qui emprunte les dispositifs habituels des jeux en réseau tels que l’affichage des scores, des records, et la comparaison entre amis, lesquels ont la possibilité de se noter les uns les autres. Le processus de ludification (ou de gamification) est au cœur du système chinois. Le gouvernement tente ainsi de faire passer l’obéissance totale pour un jeu permanent dans lequel tout le monde peut gagner quelque chose, comme dans les casinos en ligne. C’est une méthode de contrôle social déguisée en jeu vidéo.
À cet égard, WeChat, le téléphone du Net né en 2011, qui compte près d’un milliard d’utilisateurs en Chine, a beaucoup facilité les expérimentations depuis 2014. Un assez grand nombre de jeunes citadins se sont portés volontaires pour livrer leurs données 10 . Ils ont participé aux expériences en y voyant des avantages et une marque de distinction up-to-date, un signe de reconnaissance branché, une preuve de bonne réputation, et pour certains, un trait de disruption désirable au summum de la « postmodernité ».
Les sciences et les technologies étant associées au progrès social dans les imaginaires, nul doute que les populations urbaines et connectées y trouveront un substitut à la défaillance des représentations politiques en voie d’extinction. D’autant que les innombrables contrefaçons, les aliments toxiques et les laits pour bébé contaminés, la corruption des fonctionnaires locaux, les pollutions persistantes qui obligent à porter un masque même en l’absence d’épidémie, la dureté et l’inhumanité de l’exploitation, toutes choses issues d’un développement gigantesque, fulgurant et impérial du capitalisme en Chine – certainement le plus sauvage de tous les temps – ont provoqué une telle misère morale, matérielle, intellectuelle et politique qu’il s’en est suivi une foudroyante acculturation des masses paysannes à une société sans autre foi ni loi autres que le Yuan et le business. Dans ces conditions, le système de crédit social pourrait apparaître comme un remède à la déshérence profonde pour ces millions de personnes nouvellement prolétarisées.
Passant par-dessus la réalité du capitalisme chinois, certains analystes 11 voient dans la propagation de ce système une adhésion de principe et sans retour, ce qui ne leur permet pas d’appréhender les révoltes, certes éparses mais récurrentes, que le pouvoir s’ingénie à masquer et à étouffer. Ces commentateurs oublient toujours d’intégrer leurs analyses dans une problématique plus large et plus profonde qui leur permettrait de comprendre que la bureaucratie du PCC ne fait que surfer sur le désarroi des citoyens dont le monde intérieur est certes ravagé par ces désastres, mais qui n’en sont pas pour autant étrangers aux questionnements qui surgissent partout sur la planète, face aux dégâts du capitalisme et aux crises du néolibéralisme.
À Rongcheng en cette fin de journée *…+ c’est l’heure de « La vie du peuple à 360° ». Beaucoup se précipitent devant leur téléviseur. Chaque soir, la chaîne locale diffuse un florilège de comportements inciviques saisis par la vidéosurveillance au cours des dernières vingt-quatre heures : un vieux canapé abandonné sur un trottoir *…+ ou, pis encore, des piétons qui traversent n’importe où : les séquences s’enchaînent à un rythme haletant. Les numéros de plaque minéralogique, les visages et parfois les noms des trublions sont exhibés, entre deux mises en garde de policiers impassibles, les yeux rivés sur un prompteur *…+. Depuis qu’un détritus abandonné vaut le châtiment d’une perte de trois points, les trottoirs comme les bus sont d’une propreté confondante. Pas un mégot ni une canette vide à l’horizon. Et nul besoin d’être pris en flagrant délit par un agent pour être sanctionné : les nombreuses caméras Hikvision — le leader mondial de la télésurveillance, dont l’État chinois est l’actionnaire majoritaire — y suppléent. Traverser la rue n’est plus une gageure : sur les artères principales, les automobilistes s’arrêtent à l’approche du piéton *…+. La vitalité du crédit social est encore plus manifeste dans les petits villages de l’agglomération. Une centaine d’entre eux disposent déjà d’une « place du crédit social », où des panneaux ludiques et colorés détaillent les commandements, affichent les visages des citoyens méritants et précisent les points ajoutés ou retirés durant le mois écoulé 12 .
Selon le journal officiel Global Times du 13 mai 2019, qui cite des « analystes » du cru, le système de crédit social aidera à construire « un pays honnête et ordonné qui rendra la vie plus facile pour les gens honorables tandis que les gens discrédités rencontreront des difficultés dans tous les domaines ». Mais au- delà de cette litanie répétée sur tous les tons, les historiens et les sociologues savent depuis longtemps que lorsque des directives qui visent à « l’élévation morale et citoyenne de la population » sont promues avec insistance par une autorité gouvernementale, c’est que celle-ci a sans doute quelques difficultés à faire régner son ordre. En fait, tout cela peut être compris soit comme un constat d’échec du système social initié par le mot d’ordre «enrichissez-vous » que Deng Xiaoping a lancé au début de l’année 1992, soit comme une peur des conséquences de l’état d’esprit qui en a résulté, soit comme une paranoïa des dirigeants dont l’existence est entièrement structurée par la convoitise du pouvoir, soit encore comme un remède magique à l’appréhension que suscitent les effondrements en cours et dont ces bureaucrates ne peuvent totalement s’abstraire. La réalité est vraisemblablement une combinaison de tous ces phénomènes.
La propension à tout évaluer va croissante, qu’il s’agisse d’apprécier un échange téléphonique, de juger un livreur à une heure du matin ou un rendez-vous médical, de donner son avis sur un article, etc. Chacun est régulièrement enjoint d’exprimer son appréciation de « manager tous azimuts ». Autrement dit, grâce au big data, à Internet, aux Smartphones et à leurs dernières applications, toute vie sera dorénavant entièrement contrôlée, évaluée et notée.
Combiner les données numériques individuelles de plus en plus riches, celles qui sont issues de tout l’appareil d’Etat (éducation, santé, police, justice), les comportements enregistrés clics après clics, la surveillance par caméras à reconnaissance faciale et la fabrication de nos clones virtuels par les GAFAM , cela ressemble de près à un monde plus-que-parfait qu’Orwell lui-même ne pouvait pas imaginer 13 . Cette infrastructure se perfectionnera-t-elle « grâce » aux progrès technologiques du big data et de l’intelligence artificielle (IA) ?
À l’échelle historique, le contraste est saisissant. Aux XIX e et XX e siècles, les macro-systèmes techniques 14 consistaient en infrastructures combinant : une gestion centrale, un réseau physique (qui ne pouvait s’établir de manière stable que grâce à des décisions politiques) et un flux (eau, gaz, électricité, télégrammes…) 15 . À présent, tous les composants de ces réseaux ont évolué mais la nouveauté fondamentale, c’est que l’émetteur primaire de flux (les données) est un être humain en bout de chaîne, réduit à n’être que le prolongement de son Smartphone ou de son PC. D’ailleurs, à l’inverse des Luddites, il n’aurait pas l’idée de casser la machine qui l’enchaîne et qu’il a lui-même payée ; au contraire, il la vénère, s’y soumet et serait perdu sans elle. La cage d’acier de la 5G se profile…
L’autre contraste historique est radical, définitif : alors qu’auparavant les religions mettaient des limites, la nouvelle dévotion a entraîné un mouvement inverse. Il faut repousser les frontières, crever les plafonds. Toujours plus haut, plus fort, plus loin, plus vite, plus globalement répandu, aucune borne n’est acceptable puisque « tout ce qui peut être fait doit être fait » nous dit le biologiste, ancien membre du conseil national d’éthique Henri Atlan, et avec lui tous les scientifiques qui se piquent de philosophie. D’ailleurs, « on n’arrête pas la science », ni le progrès…
En avril 2015, des chercheurs chinois annoncent avoir opéré des modifications génétiques sur des embryons humains. Fin janvier 2018, d’autres chercheurs chinois ont, pour la première fois, réussi à cloner des primates. Entre-temps, Xu Xiaochun a créé Boyalife, le plus grand centre de clonage animal, dans la ville portuaire de Tianjin, à 30 km au sud-est de Pékin. Il ambitionne de fabriquer, à l’horizon 2020, des chiens, des chevaux et un million de vaches clonées par an. Sans ciller, il annonce au sujet du clonage humain : « La technologie est prête, l’opinion, pas encore. 16 » Après avoir été l’atelier du monde, la Chine pourrait devenir le laboratoire de transformation des vivants en zombies clonés par millions.
Nous savons que les réseaux sociaux et Internet font l’objet d’une étroite surveillance qui ne connaîtra d’autres limites que technologiques, celles du web, des big data, etc. Mais à la différence de tous les fichiers auparavant constitués par les États, leurs polices, le mouvement eugéniste, les nazis ou les milices, le système de crédit social est visible, consultable : les individus sont parfaitement informés de cette surveillance continue qui s’affiche sur leurs écrans avec un score à améliorer. En novlangue néolibérale, cela s’appelle un « scoring comportemental interactif et ludique 17 ». Mais, au lieu de s’en émouvoir, les personnes concernées l’examineront des dizaines de fois dans la journée afin de le valoriser, comme les autorités les y encouragent. Et cela ne ressemblera plus du tout à un fichier, du moins dans l’acception que ce terme pouvait avoir avant l’invention de la micro-informatique.
D’autre part, il est impossible de faire l’impasse sur ce que charrie le nom même de ce machin, le crédit social. L’État chinois fait crédit de mille points au départ ; il s’agit donc d’un prêt ou d’un don conditionnel. Ces points ne vous appartiennent pas en propre car vous n’avez pas été à l’origine de cette abstraction ; de plus, le donateur a toute latitude pour vous les retirer si votre vie n’est pas conforme aux canons édictés. Vous allez donc vivre à crédit, c’est-à-dire sous perfusion numérique et en l’occurrence sous la menace de disparaître dans les oubliettes des listes noires après avoir été exposé sur des écrans géants. C’est aussi le destin final des joueurs en Bourse, enfin des petits joueurs, dont l’attitude majoritaire consiste à scruter le cours des actions, à vendre, acheter et échanger dans l’optique d’une fructification incertaine et toujours repoussée. En effet, le gain ne devient réel qu’une fois la vente effectivement réalisée, c’est-à-dire lors de la cession des actions.
Ainsi ce crédit fera de tout un chacun le gestionnaire quotidien d’un portefeuille de type nouveau: les points / actions de sa propre vie. Tous spéculateurs! Un grand pas de l’humanité vers l’hyper modernité.
Cambridge Analytica a joué un rôle-clef dans l’élection de Donald Trump. En juin 2017 déjà, une étude de l’Université d’Oxford concluait que Facebook et Twitter étaient devenus des outils de contrôle social. Sans doute le système de crédit social permettra-t-il bientôt de traquer toute velléité de dissidence, mais il sera d’abord un instrument d’auto-censure et d’asservissement.
Tous les pouvoirs actuels ont une forte tendance à vouloir résoudre les problèmes de société – et plus exactement leurs effondrements – grâce à des « patches technologiques ». Ce solutionisme emprunte toujours à l’arsenal techno-scientifique les concepts, les idées et les moyens qui nous ont précisément conduits au bord du gouffre. Il en est ainsi du big data et de l’intelligence artificielle : après avoir été créés pour l’armée, développés pour le commerce puis l’exploitation en ligne de travailleurs précarisés, voilà que conformément à leur possibilité de gérer et de catégoriser un grand nombre de données et de comportements, ils sont logiquement utilisés pour le contrôle social et politique des populations. Cela prépare une incommensurable mutation de l’ingénierie sociale d’antan (recensements, statistique des populations…) vers un système numérique totalitaire et déshumanisant mais rendu indispensable à la vie courante.
Ainsi, il pourrait devenir impossible d’acheter un billet de train ou d’obtenir une place de crèche sans divulguer son score. A ce moment-là, personne ne pourra plus échapper à la pression constante de l’appareil d’Etat. Tenter de se soustraire à la collecte systématique des données personnelles deviendrait peine perdue. Imaginez un monde où votre accès aux services publics, à une connexion Internet ou à certains emplois seraient directement corrélés à une notation qui vous collerait à la peau, partout, tout le temps, exactement comme un chauffeur Uber ou un livreur eBay. Noter tous les humains, en permanence, dans un projet de management implacable.
Une dictature panoptique mathématiquement établie, technologiquement répandue, une organisation scientifique de la surveillance qui aurait pour bur d’enrôler la majorité des populations, tout en laissant survivre quelques archipels-témoins du l’ancien monde.
Environ quatre-vingt-dix millions de personnes, dont beaucoup d’étrangers, utilisent un VPN en Chine (réseau privé virtuel, qui permet d’obtenir une liaison sécurisée hors du pays et d’invisibiliser son adresse IP pour gagner en anonymat sur internet et protéger ses données). La pratique était plus ou moins tolérée par le pouvoir, qui ne pouvait pas paralyser l’économie en empêchant les entreprises de se connecter à leurs serveurs basés hors des frontières ou les scientifiques de lire les publications étrangères.
Mais le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information a annoncé qu’à compter du 1 er février 2018, une autorisation était nécessaire pour utiliser un VPN. Certains fournisseurs ont alors dû mettre la clé sous la porte.
C’est le « challenge du siècle » : la Chine actuelle pourra-t-elle devenir une dictature digitale plus féroce que la Chine maoïste sous la Révolution culturelle ? Elle a plusieurs atouts en main pour cela. Sa population est énorme, les données personnelles sont très peu protégées et l’État investit massivement dans l’intelligence artificielle. Le Big Brother chinois ne rencontre à ce jour aucun obstacle infranchissable : ni social, ni juridique, ni médiatique. Aucune loi n’encadre les pouvoirs de la police. Personne n’a accès aux données collectées, exceptées quelques personnes au sommet de l’État, qui doivent probablement les recevoir via une courroie de transmission secrète et dédiée.
Mais si la Chine peut le faire, alors pourquoi les autres pays ne le feraient pas ? D’autant que l’idéologie néolibérale affronte de par le monde une triple crise : écologique, sociale et démocratique, qui menace les pouvoirs en place.
Pour le moment, tous les journaux main stream de l’Occidentalie s’égosillent et pointent du doigt ce qu’ils caractérisent comme une atteinte insupportable aux droits de l’Homme etc. Maya Wang, chercheuse pour Human Rights Watch a écrit : « Nous sommes en mesure de démontrer que le recours au Big Data par les services de renseignement du gouvernement chinois non seulement viole de manière flagrante le droit à la vie privée, mais permet également aux autorités de détenir arbitrairement des personnes » 18 . Voici comment, en novlangue technocratique, ces constatations sont traduites : « Du point de vue européen, l’équation à résoudre s’annonce délicate : le poids que va peser la Chine dans le développement de l’IA rend le dialogue économique et politique impératif 19 ». Autrement dit, « il va bien falloir collaborer si nous voulons pérenniser nos profits ». C’est cela l’infini pragmatisme du capital : s’adapter ou mourir.
Du côté des idéologues, si l’on résume l’argumentaire, cela donne : « Ce pays n’étant pas une démocratie, l’outil numérique devient un incroyable pouvoir de contrôle policier ». Mais détestable en Chine, serait-il acceptable en Occident ? Tout dépendrait-il de qui s’en sert et comment ? Une litanie renouvelée à dessein qui masque la nature intrinsèque du numérique : tout numériser, ce qui est en parfaite congruence avec la propension du capital à tout valoriser, avec l’aspiration des États à « gérer les troupeaux » ou avec la prétention du mode de connaissance scientifique à rendre compte du réel par des abstractions commensurables.
Mezzo voce, l’alerte a tout de même été sonnée dans les think tanks libéraux et dans les ministères occidentaux : « Pékin prétend être leader mondial dans le domaine du crédit social et propose de diffuser ces pratiques à l’étranger, notamment dans le cadre du projet des nouvelles routes de la soie 20 ». Ce langage traduit un penchant primordial pour la pérennité du capitalisme occidental qui voit son boomerang chinois lui revenir droit dessus, d’où ces cris vengeurs, ce chant du départ en Trumpette :
Entendez-vous dans le Sichuan
Mugir ces féroces Chinois ?
Ils viennent jusque dans nos banques
Détrousser nos fils, nos compagnes. (bis)Quoi ! nos ateliers passeraient
Sous surveillance du PCC !
Quoi ! des cohortes de TianjinFeraient la loi dans nos usines ?
Quoi ! ces phalanges mercenaires
Terrasseraient nos managers ?
Après la mort de Mao en 1976, la Chine est devenue en quelques décennies l’atelier du monde pour le plus grand profit du capital local et transnational. Il s’y est alors déroulé une prolétarisation inédite des masses paysannes expulsées de leurs campagnes, si bien qu’entre la mort de Mao et 2018, leur pourcentage dans la population est passé de 69 % à 40 %, tandis que la population urbaine augmentait, quant à elle, de 556 millions d’habitants 21 . Pour comparaison, rappelons qu’au début du XIX e siècle, la population européenne était de 187 millions et qu’elle atteignait 420 millions un siècle plus tard.
Durant ce « grand bon en avant » pour paraphraser Mao, les paysans chinois ont été jetés dans des usines dont la vétusté n’avait parfois rien à envier à celle des fabriques des débuts du capitalisme en Occident. Alors que « la croissance » chinoise faisait l’admiration de l’Occidentalie, leurs conditions de travail et de vie étaient comparables, sinon pires que celles décrites par René Villermé en 1837. Là encore, la prosternation devant une abstraction – « la croissance à deux chiffres » – a permis de refouler la misère réelle de centaines de millions de personnes. Pour ces paysans, ce fut un anéantissement de leur culture ancestrale, de toutes les formes organiques de leur existence, un démembrement rapide et violent des communautés, une déstructuration des rapports au Monde, à la Terre, au vivant, ce qui a finalement culminé dans la réduction de toutes leurs activités au substantif de travail, une catégorie qui ne fait que dissimuler une réalité, la misère du salariat.
Cette prolétarisation de masse, cette réduction des paysans à n’être, dans des conditions ignobles, que le prolongement des machines, constitue un dessaisissement violent de leur être en tant que personne, une déshumanisation radicale. La violence avec laquelle cela s’est fait est inouïe, elle n’a pas d’équivalent à cette échelle et en si peu de temps dans l’histoire humaine. Si, du point de vue de l’anéantissement des êtres et des consciences, la déportation des esclaves africains pourrait être comparée – ce qui est toujours délicat – à ce qui s’est produit en Chine depuis les années 1960, les échelles de population restent incomparables. Des documentaires comme « À l’ouest des rails » de Wang Bing ou ceux de Zhao Liang donnent une idée de cet enfer. Aux commandes de cette dévastation, une bureaucratie sans états d’âme qui a sur la conscience, entre autres choses, les millions de morts de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne qui a fait l’admiration de nos intellectuels de pacotille dans les années 1970, la fameuse GRCP. Et lorsque des milliers de jeunes manifestèrent sur la place Tien an Men en juin 1989, Deng Xiaoping y mit fin par un massacre de masse. Ce que l’on sait moins, c’est qu’un coup d’état lui fut nécessaire pour l’exécuter sans encombre : tous les membres du gouvernement furent alors placés en résidence surveillée pendant que « l’armée populaire » tirait sur « le peuple » et sa jeunesse révoltée par l’absence de démocratie du régime. C’est dire à quelles extrémités ces individus sont prêts pour garder le pouvoir et de quel bois ils sont faits. Sur un autre mode, la chape de plomb que Xi Jinping a fait tomber sur la société civile depuis 2012 a rendu la contestation réelle, dans les rues et sur les places, très difficile. Restait la consolation numérique d’Internet. Va-t-elle à présent devenir également impossible ? La reconnaissance de mots écrits ou prononcés par les algorithmes éduqués est d’ores et déjà une réalité qui oblige les Chinois à bien des ruses. Il convient maintenant de garder en tête que « ça n’arrive pas qu’aux autres »…
Ce que ce texte tente de mettre en lumière, c’est que l’ancienne forme de prolétarisation – au sens du dessaisissement de l’être par l’avènement du capital au XIX e siècle – est en train de se doubler d’une nouvelle forme de prolétarisation des individus, plus souterraine et « moderne », plus discrètement physiologique, plus psychique et, pour tout dire, plus radicale puisque, comme le dit Michel Desmurget, il s’agit de La fabrique du crétin digital 22 . Celle-ci mènera assurément à des transformations majeures : l’avènement d’une « Autre Humanité » adaptée à un « totalitarisme démocratique » dont la Chine est le laboratoire expérimental.
1 – Stephen Innes, responsable de la stratégie des marchés chez AxiCorp : « Au final, les perdants sont les plans de retraite durement acquis par certains travailleurs et ceux dont le départ à la retraite est repoussé de cinq à dix ans. » Bourse direct, 17 mars 2020.
2 – Voir absolument « Le Monde selon Xi Jinping », film documentaire d’Arte. https://www.youtube.com/watch?v=xsEzLw6_gJU
3- Simon Leplâtre, « La Chine mène un vaste plan pour évaluer les citoyens », Le monde, 10 juin 2017 et « En Chine, des citoyens sous surveillance », Le Monde, 15 juin 2018.
4 – Condensé de la novlangue officielle du guide, secrétaire-général du Parti et président de la République Xi Jinping, à travers ses différentes interventions.
5 – David Bandurski, « Project Dazzling Snow: How China’s total surveillance experiment will cover the country », Hong Kong Free Press, 12 août 2018.
6 – Philippe Crevel, « L’intelligence artificielle au service de la régulation sociale et politique – Le crédit social en Chine », Revue en ligne Les français.press https://lesfrancais.press/lintelligence-artificielle-au-service-de-la-regulation-sociale-et-politique-le-credit-social-en-chine/
7 – YUSHO CHO and NIKKI SUN, Nikkei staff writers, “China expands reach of trustworthiness system”, Nikkei Asian Review, 3 mars 2019. https://asia.nikkei.com/Business/Technology/China-expands-reach-of-trustworthiness-system
8 – http://institut-thomas-more.org/2019/07/29/le-systeme-de-credit-social-%E2%80%A2-comment-la-chine-evalue-recompense-et-punit-sa-population/ et China Law Translate, “Beijing Municipal Action Plan for Further Optimizing the Business Environment (2018-2020)”, 19 novembre 2018.
9 – Il existerait aujourd’hui 51 listes noires sectorielles. « China expands reach of trustworthiness system”, article déjà cité.
10 – Lire à ce sujet Hervé Krief, Internet ou le retour à la bougie, Quartz, 2018 ; Nicolas Carr, Internet rend-t-il bête ?, Paris, Robert Laffont, 2011 ; Michel Desmurget, La fabrique du crétin digital, Paris, Seuil, 2019.
11 – Genia Kotska, « China’s social credit systems and public opinion : Explaining high levels of approval », 23 juillet 2018.
12 – René Raphaël & Ling Xi, « Bon et mauvais Chinois. Quand l’État organise la notation de ses citoyens », Le Monde diplomatique, janvier 2019.
13 – mais lu. Nous n’en sommes plus là. Life Inside China’s Total Surveillance State, https://youtu.be/OQ5LnY21Hgc
14 – Alain Gras, Les Macro-systèmes techniques, Paris, PUF, 1997.
15 – Dont on peut dire qu’aujourd’hui la valeur réside non plus dans sa matérialité mais essentiellement dans « l’opportunité financière » qu’il ouvre, à savoir de ponctionner régulièrement par voie d’abonnement des millions d’individus.
16 – Science et Avenir, 23 avril 2015, 1 er décembre 2015 et 25 janvier 2018 et les Echos du 24 novembre 2015.
17 – « Le scoring comportemental permet de travailler la segmentation des prospects et consiste à leur attribuer une note quant à l’état de leur relation avec vous. En fonction de ses actions, le score du prospect évolue : un passage sur la page tarifs, et le lead s’envole… » Site « GetQuanty, veille B2B… »
18 – Médiapart, blog de Silk Road, 26 mars 2018.
19 – Institut Thomas More, Juillet 2019, note 36.
20 – idem
21- Selon French.china.org.cn : http://french.china.org.cn/business/txt/2019-09/03/content_75168546.htm
22- Opus déjà cité.
14/04/2020
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